Homeless. uc.

Une lumière blanche éclaira soudain la pièce. Le lustre s'illumina, chassant l'obscurité d'une cuisine. Maya marchait en traînant des pieds, réveillée en pleine nuit par une faim et une soif soudaines. Elle ouvrit le frigo, prit de quoi se ravitailler et s'assit sur une chaise haute, placée devant une petite table de cuisine. Elle soupira. C'était la cinquième nuit de suite. Chaque fois, son père, le lendemain, doutait des raisons pour laquelle elle se levait la nuit. Bien sûr. De toute façon, il ne l'avait jamais crue. Depuis la mort de sa mère alors que Maya avait à peine huit ans, son père ne croyait plus en rien ni personne, même pas en sa propre fille. Il restait constamment à la maison, sur Internet, essayant de se consoler sur des forums bidons et sans intérêts pour «personnes désemparées». Il ne voulait pas l'avouer, mais il le savait, que ça n'était rien d'autre qu'un passe-temps pour dépressifs. Maya ne s'en souciait même plus. Elle avait seize ans aujourd'hui, et ce n'était pas son lâche de père qui allait lui gâcher la journée. Elle regarda son téléphone, qui affichait 5:30. Tant pis. Dans tous les cas, elle aurait dû se lever à six heures pour aller au lycée. Elle se leva et se prépara, comme chaque matin, à aller dans cette école, cet endroit où elle se sentait le mieux, où elle se sentait proche de peu de personnes, mais de personnes biens. Elle fit son sac, et, à l'heure qui afficha sept heures quarante-cinq, elle partit en direction de l'arrêt de bus, situé à quelques centaines de mètres de là.

***

Les fêtes de fin d'année approchaient, et ça se voyait.
Le lycée était décoré entièrement de guirlandes, de sapins et d'affiches de Noël aussi colorées que variées les unes que les autres. Les affiches des lycéens spécialisés Arts Plastiques ornaient les couloirs du lycées, et même une bannière marquée expressivement «Sal dé prauffes» était accrochée au dessus de la porte de la salle. Chaque prof avait droit à son bonnet de Noël, ainsi que les élèves et toute l'équipe administrative, y compris le proviseur et la secrétaire. Autant dire que ce lycée était très actif et très impliqué.

Maya avançait dans la cour, discutant avec Marion et Haïdi, deux amies d'enfance. Toutes les trois avaient vécu beaucoup de choses ensemble, et elles iraient jusqu'au bout, elles se l'étaient promis. Quelques tas de neige de la nuit précédente étaient présents sur les toits des bâtiments, ainsi que dans les coins de la cour et des bureaux administratifs.

«Encore ?! s'exclama Marion, ton père va te tuer ce soir.
-Pff, j'ai pas peur. De toute façon, il n'a rien à me faire perdre.
-Oui, mais oublie pas l'exposé d'anglais, fit remarquer Haïdi. On le fait ce soir ou jamais. Et j'ai pas envie de me prendre un zéro pour ça.
-T'inquiète, Haï. On se débrouillera.
-J'espère.»

Et la sonnerie retentit. Les élèves se rangèrent pas classe devant leurs salles respectives, attendant le professeur. Les élèves de 1eD étaient rangés au fond du couloir 2, bâtiment 3, salle 8. Ils se retournaient sans cesse vers un jeune homme de leur âge, grand, bien habillé et coiffé, appuyé contre le mur, seul. Le nouveau. Les filles le regardaient avec curiosité, les garçons l'ignoraient. Maya en particulier le fixait des yeux. Lui aussi la fixait. Pour elle, c'était comme un rêve. Elle essaya de parler, mais...

«Excusez moi du retard, sortez vos affaires et prenez votre livre à la page 62, dépêchez vous.»

Maya sortit de sa bulle. Elle rougissait, et ça se voyait. Ses copines lui jetaient des regards coquins, voulant tout dire. Les élèves s’essayèrent dans la salle, et le nouveau resta debout, pour que le professeur fasse les présentations. Il fit signe à l'adolescent d'avancer, et fit d'un ton presque clameur :

«Voici Dylan. Il vient de loin, et ne connaît personne ici. Faîtes lui bon accueil s'il vous plaît.»

Des applaudissements et des bavardages fusèrent. Il est bg n'empêche... T'as vu ses yeux ? Wow. Non mais t'as vu comment il se la pète ? De toute façon, il pourra jamais remplacer Paul. N'empêche qu'il a l'air sympa.

uc.